L’intelligence artificielle entretient des interactions dans deux directions avec les sciences humaines et sociales (SHS): d’une part, l’intelligence artificielle permet d’élargir le champ d’étude des disciplines concernées des SHS en y apportant de nouveaux outils; d’autre part, les SHS apportent des paradigmes et méthodes permettant de mieux analyser les impacts sociétaux de l’intelligence artificielle.
IA et sciences économiques. L’entrée de l’intelligence artificielle dans ce champ disciplinaire a eu lieu à partir des années 1990. Les sciences économiques posent souvent des postulats de rationalité des agents en situation de prise de décision qui, s’ils sont souvent discutables lorsqu’il s’agit de modéliser le comportement humain, s’avèrent précieux pour la branche de l’intelligence artificielle qui cherche à programmer de tels agents. Notamment, les recherches en planification font largement appel à la théorie de la décision, tandis que les systèmes multi-agents* font appel à la théorie des jeuxthéorie mathématique modélisant les interactions stratégiques entre un certain nombre d’agents (individus, organisations, robots, etc.), permettant de trouver les comportements optimaux, afin par exemple de tenter d’expliquer ou de prédire le comportement des agents. Les notions de solution en théorie des jeux, notamment la notion... More* et à la théorie du choix social. À l’inverse, les méthodes de simulation à base d’agents permettent de questionner certaines théories économiques, en procédant à des expérimentations “in silicoexpérimentation d’un processus au moyen d’un ordinateur (par analogie avec “In vivo” pour les expérimentations sur des organismes vivants).... More*”.
IA et droit. Le développement de modèles formels et d’algorithmes permet d’automatiser le raisonnement et la décision à partir de connaissances* légales. Par ailleurs, la constitution de grandes masses de donnéesinformations ayant un caractère factuel, car se rapportant à des cas singuliers, elles peuvent provenir notamment de capteurs, ou de recueils auprès de personnes. C’est devenu un fait de société, que les données (en anglais “Data”) abondent dans de nombreux domaines, et qu’il faut en... More juridiques se prête, au moyen de tâches d’apprentissage, à l’analyse des décisions juridiques et à l’aide à la jurisprudence (dans ce cadre, mentionnons le problème important des biais d’apprentissage, qui peuvent conduire à des décisions injustes envers certains groupes d’individus); on parle du problème d’équité (“ fairness in Machine Learningexpression générique, anglaise, recouvrant toutes les formes et méthodes d’apprentissage artificiel.... More”). Enfin, dans la direction opposée, l’intelligence artificielle est devenue un objet d’étude du droit, notamment pour tenter de régler les problèmes légaux et éthiques liés au déploiement des algorithmes d’intelligence artificielle, des robots, drones, et autres véhicules autonomes.
IA et philosophie. Diverses branches de l’intelligence artificielle, notamment la représentation des connaissances, le raisonnement automatisé, les agents autonomes, et les architectures cognitives, sont largement fondées sur des modèles issus de la philosophie (notamment la logiquela logique, qui apparaît dans la Grèce Antique avec l’étude des syllogismes, s’intéresse à la formalisation du raisonnement. La lo- gique moderne, qui se développe à partir du XIXe siècle, a conduit à la formalisation d’un véritable calcul déductif à partir de formules logiques formées... More*, la philosophie du langage, et la théorie de l’esprit). D’ailleurs, de nombreuses questions sont étudiées par les deux communautés (telles que: qu’est-ce qu’une connaissancedans l’acception spécifique de ce mot, les connaissances ont en principe un caractère générique, souvent sous forme de règles (par exemple, « les hommes sont mortels », « les oiseaux volent »...). Elles sont en général recueillies auprès d’experts (voir aussi ontologies*), ou obtenues à... More? Qu’est-ce que la vérité? etc.). Par ailleurs, l’intelligence artificielle pose des questions difficiles (notamment des questions éthiques, l’identité des agents autonomes, la place de l’intelligence artificielle dans la société, sans oublier le test de Turingtest proposé par Alan Turing en 1950, basé sur un jeu d’imitation: la machine doit réussir à se faire passer pour un humain qui interagit avec elle. On présente souvent le test de Turing comme étant le test empirique de l’“intelligence artificielle”, mais, même si... More*) sur lesquelles se penchent certaines branches de la philosophie.
IA et sciences des réseaux. À la frontière de l’intelligence artificielle, l’étude des systèmes complexes a été à l’origine d’un nouveau champ de recherche en sociologie: l’analyse des réseaux (entre individus dans un réseau social, entre pages web) et des communautés numériques. Outre cette analyse des réseaux sociaux et de la structure sociale du web, la représentation des connaissances et le raisonnement automatisé ont permis des avancées considérables en ce qui concerne la représentation et la manipulation des ontologies*, et ses applications au web sémantiquetechniques qui visent à organiser et exploiter les informations présentes sur le web (liens, connaissances* ontologiques, etc.) afin notamment d’en permettre un traitement automatisé et d’obtenir ainsi par exemple des réponses plus pertinentes aux requêtes des utilisateurs. (voir aussi : ontologie*)... More*.
IA et humanités numériques. Débordant le périmètre de l’intelligence artificielle, les humanités numériques ont pour vocation d’appliquer méthodes et outils numériques aux SHS (en particulier, à la littérature). Les outils de reconnaissance de formes sont évidemment précieux pour analyser documents anciens, sons ou musiques. Le traitement automatisé des langues naturelles et l’analyse de sentiments ont aussi un impact majeur en ce qui concerne l’analyse et la classification de nouvelles sources documentaires: blogs, tweets, sites web, voire débats en ligne.